Projet de loi Climat et Résilience : 1er bilan du passage à l’Assemblée nationale pour le secteur du e-commerce

5304
Imprimer

L’Assemblée nationale vient de terminer l’examen des articles du projet de loi dit « Climat et Résilience ». La Fevad a suivi de près les débats. Elle a été auditionnée par les différents rapporteurs et pris position sur un certain nombre de dispositions susceptibles d’impacter le e-commerce. L’heure est donc venue de dresser un premier bilan.

Parmi les dispositions les plus impactantes du projet de loi figure l’article 52 qui fixe un principe général d’interdiction de création de nouvelles surfaces commerciales au nom de la lutte contre l’artificialisation des sols. A l’issue des débats en séance, les entrepôts e-commerce ne sont pas visés par l’article 52. En effet, les amendements visant à les inclure ont été rejetés, comme ils l’avaient déjà été lors de la discussion en Commission.

La Fevad salue la décision de bon sens des députés.  

Elle rappelle en premier lieu que les entrepôts e-commerce représentent moins de 0,2% des terres artificialisées, contre 14% pour les zones commerciales et industrielles et 40% pour l’habitat. Par ailleurs, à chiffre d’affaires équivalent, le e-commerce nécessite au global moins de superficie que le commerce physique.

Un moratoire sur les entrepôts e-commerce aurait donc un effet minime sur l’artificialisation des sols. Il aurait en revanche un impact maximum sur le plan de l’environnement, de l’emploi et de la transition numérique du commerce.

Alors que les besoins en capacités logistiques e-commerce vont augmenter afin de faire face à l’augmentation des commandes des Français sur internet, bloquer le développement des entrepôts e-commerce en France aurait inévitablement pour conséquence de devoir recourir à des entrepôts situés à l’étranger.

Cette délocalisation de la logistique e-commerce chez nos voisins serait préjudiciable à plus d’un titre.

Sur le plan environnemental, elle entrainerait un allongement des distances pour livrer des millions de commandes à partir de l’étranger. Une livraison qui, le plus souvent, sera réalisée par des transporteurs étrangers soumis à des normes environnementales moins exigeantes[1].

Sur le plan industriel, cela priverait les acteurs français du transport et de la logistique d’un relai de croissance important pour leur développement. En effet, une grande partie de la logistique e-commerce est externalisée par les sites pour être confiée à des opérateurs français de la logistique. Au-delà du commerce, c’est toute la filière du transport et de la logistique, secteur stratégique pour l’avenir de notre industrie et la souveraineté de notre économie, qui sera touchée.

Sur le plan de l’emploi et des finances publiques, cela reviendrait à nous priver des emplois et des recettes fiscales liés aux livraisons réalisées depuis l’étranger, et dont pourtant la France aura besoin pour accompagner la sortie de crise.

Enfin, certains ont mis en avant l’argument d’équité entre le commerce physique et l’e-commerce et la protection des petits commerces. Pourtant ce sont bien les TPME et les magasins physiques qui seraient les plus pénalisés par la mesure d’interdiction des entrepôts e-commerce en France. Car contrairement aux grandes entreprises internationales, la plupart de nos TPME françaises n’auront pas la capacité d’organiser leurs ventes en ligne à partir d’entrepôts situés à l’étranger. Alors que seuls 30% des commerces de proximité français utilisent internet, contre 70% en Allemagne, et que le gouvernement vient de lancer un vaste plan pour encourager les petits commerçants à utiliser davantage le e-commerce, il n’y aurait aucun sens à organiser une pénurie des capacités logistiques en France.

Pour toutes ces raisons la FEVAD se félicite du rejet des amendements visant à interdire l’implantation de toute nouvelle installation logistique en France, et remercie, au nom des 200.000 entreprises disposant d’un site e-commerce en France, les députés qui ont écarté l’interdiction des entrepôts e-commerce.

De même, elle prend acte de la prise en compte des entrepôts logistiques dans le document d’orientation et d’objectifs prévu à l’article L141-6 du code de l’urbanisme, mesure introduite par voie d’amendement et visant à intégrer les entrepôts logistiques dans les politiques publiques de planification.

Par ailleurs, consciente des enjeux autour de l’environnement, la FEVAD n’en demeure pas moins convaincue de la nécessité de travailler collectivement avec l’ensemble des acteurs de la chaine de valeur, sur les moyens d’améliorer l’efficacité foncière et environnementale des entrepôts e-commerce en France.

Bien entendu, le projet de loi ne se limite pas à la question de l’artificialisation des sols. Il comporte de nombreuses autres mesures applicables à l’ensemble des acteurs économiques. On notera au passage que le nombre d’articles du projet de loi a plus que triplé, passant de 69 à plus de 210 articles. Certains d’entre eux auront un impact plus spécifique sur les activités du e-commerce. Parmi eux figurent les mesures concernant :

  • L’information des consommateurs sur l’impact environnemental des produits et services vendus en magasin ou sur internet. Cette mesure pourrait notamment concerner la livraison.
  • L’extension de l’obligation d’équipement en photovoltaïque ou de végétalisation des toitures aux immeubles professionnels d’une emprise de plus 500 m² et faisant l’objet d’opérations de rénovation lourde ou de reconstruction.
  • La suppression par paliers jusqu’en 2030 de l’avantage fiscal dont bénéficie le gazole routier sur la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE) et possibilité de mise en place une contribution régionale sur le transport routier de marchandises, ce qui devrait entrainer une augmentation des coûts du transport dans les prochaines années.

Le projet de loi sera examiné par le Sénat dans les prochaines semaines. La Fevad restera mobilisée sur un texte qu’elle considère comme une étape importante dans la voie d’un développement économique plus durable et responsable dans laquelle nos entreprises sont engagées et souhaitent poursuivre leurs efforts dans les années à venir.

[1] La très grande majorité des transports internationaux sont réalisés par des transporteurs étrangers, alors que les transports nationaux sont très largement opérés par des acteurs français. Ainsi, 60% des livraisons e-commerce sont aujourd’hui réalisées par le Groupe La Poste qui dispose d’une des plus grandes flottes au monde de véhicules électriques et s’est engagée à assurer la neutralité carbone de ses services.