L’interview du mois : Jean-Philippe Evrot, dirigeant et fondateur de Break Media

1517
Imprimer

Nous avons interviewé Jean-Philippe Evrot, dirigeant et fondateur de Break Media, un média destiné à la Gen Z,  et de Break Club, qui  assiste les marques à intégrer cette génération dans leur  business model. Jean-Philippe Evrot nous explique en quoi la génération Z se démarque de ses prédécesseurs et comment mieux communiquer auprès d’elle.

1/ Pourriez-vous présenter, votre média et agence et pourquoi vous êtes-vous spécialisé dans le marketing pour la Gen Z ?

Nous avons lancé Break Media parce que cette génération ne se retrouvait plus dans les médias traditionnels, que ce soit dans les codes ou dans la hiérarchie du traitement de  l’information. Ces médias n’étaient plus en phase avec leurs usages de consommation de contenus.

En plus de cela, on trouvait que cette génération est trop peu visible dans les médias traditionnels et dès qu’un sujet les concerne – et c’est rare – ils sont  trop souvent dévalorisés ou décrits de manière stéréotypée.

Donc on a décidé de créer un média 100% affinitaire Gen Z pour les informer, les divertir, les émanciper mais aussi pour leur donner la parole sur des sujets qui les intéressent, les questionnent, les complexent… et sans jamais être dans le jugement ou se positionner en détenteur de la vérité.

En parallèle, fort de notre premier début de succès de Break sur Tiktok et suite aux diverses expériences professionnelles de l’équipe en rapport avec cette cible, nous avons décidé de lancer Break Club, une  agence créative pour aider les marques à intégrer cette génération dans leur business model.

2/ Comment décririez-vous les nouveaux comportements qui caractérisent la génération Z aujourd’hui et en quoi ils diffèrent des générations précédentes ?

C’est la première génération née avec le digital, elle est surinformée et a donc des attentes et des exigences beaucoup plus élevées envers les marques.

Elle a inversé les rapports de loyauté : ce n’est plus à eux d’être fidèles à une marque, ils attendent au contraire que les marques leur soient fidèles. Si ce n’est pas le cas, ils zappent.

C’est aussi une génération qui a déjà vécu plusieurs crises importantes (crise financière, crise sanitaire…) et elle est donc beaucoup plus réaliste, voire un peu plus pessimiste  que les générations précédentes et par conséquent plus économe et a appris davantage à se débrouiller, se faire de l’argent de poche beaucoup plus facilement et elle court moins après la reconnaissance sociale.  C’est la génération DIY (do it yourself) et qui par souci d’économies et ayant une plus forte conscience écologique préfère souvent chiner et acheter des vêtements vintage, d’occasion…

C’est une génération qui a complètement intégré les réseaux sociaux pour trouver de l’inspiration, rechercher, comparer des produits et pour se connecter avec les marques.

D’ailleurs la part de l’influence des réseaux sociaux et des contenus en ligne dans leur décision d’achat est très importante (80%).

Alors que les précédentes générations étaient dans l’expression de soi, cette génération se focalise sur l’exploration de soi. Rechercher, s’engager dans la découverte, tester et apprendre pour mieux se connaître est leur leitmotiv.

3/ D’après-vous comment les marques et les plateformes doivent-elles adapter leur manière de communiquer pour résonner auprès de la Gen Z ?

Au-delà de la manière de communiquer, cette génération ne veut plus de marques « héroïques », qui prétendent améliorer, changer le monde. Ils attendent des marques qu’elles les accompagnent, qu’elles soient à leurs côtés dans l’exploration de leur identité, de leur vie, comme un coach bienveillant et sans hiérarchie. Ils sont parfaitement  et très rapidement conscients de ce qui est authentique ou pas.

On voit aussi chez les marques que l’UGC (User Generated Content) avec de simples placements produits ou hauls réalisés par les influenceurs est de moins en moins ROIstes. La Gen Z zappe de plus en plus ce genre de contenus dans lesquels ils ne trouvent plus beaucoup d’intérêt et qui ne créent que très peu de liens entre les marques et eux.

Je pense que la différence entre « consommer » du contenu et « consommer » du produit va être de plus en minime : le média brouille ces formes, les contenus deviennent directement « shoppable ».

Les consommateurs eux-mêmes sont des créateurs de contenus et le contenu de divertissement est en train de devenir le lien entre les marques et cette génération.

Nous sommes dans les débuts du divertissement social, ce que l’on appelle le CGE (Community Generated Entertainment : Divertissement Généré par les Communautés). Les communautés et les créateurs de contenus participent à la création de contenus pour une marque de manière à divertir leur propre public, qu’ils connaissent parfaitement. Ainsi ils créent des liens beaucoup plus forts, plus authentiques entre la marque et leurs audiences.

Cela veut dire que les marques vont devoir davantage lâcher prise, vont devoir davantage faire confiance aux créateurs de contenus, à leur créativité, à nous agences, médias qui connaissons parfaitement les usages des réseaux, de ce qu’attend cette génération Z car nous avons testé de nombreux formats avant, tirés  des enseignements et collaboré aussi avec de nombreux créateurs de contenus.

Et lâcher prise ne veut pas dire ne pas être en adéquation avec les valeurs d’une marque et du message qu’elle veut véhiculer.