A la veille de l’application imminente en France des nouvelles règles européennes de transparence et d’équité entre plateformes et entreprise utilisatrices, entrées en vigueur cet été, la Fevad revient sur les principales dispositions du premier texte légiférant sur les plateformes et le régime d’application prévu.
Le 12 juillet 2020 est entré en vigueur le règlement dit « Platform to business » qui vise à encadrer les relations commerciales entre plateformes d’intermédiation en ligne et entreprises utilisatrices qui proposent leurs biens sur ces plateformes, ainsi qu’entre moteurs de recherche en ligne et utilisateurs de sites internet d’entreprise. Le règlement impose des mesures de transparence quant aux conditions générales de vente et des mesures d’équité en cas de différend, à travers un système interne de traitement des plaintes et un recours favorisé à la médiation.
Les dispositions prévues par le texte consistent dans les éléments suivants :
- Mise en place d’obligations de transparence pour les plateformes notamment sur les conditions générales, les critères de classement ou encore l’accès aux données ;
- Mise en place d’obligations de loyauté pour les plateformes quant aux modalités de changement des conditions générales ou encore quant aux modalités de résiliation ou de suspension du service ;
- Mise en place d’obligations relatives à la résolution des litiges entre la plateforme et les entreprises utilisatrices avec la mise à disposition d’un système interne de traitement des plaintes des utilisateurs et la désignation d’un minimum de deux médiateurs pour le règlement extrajudiciaire de tout litige avec une entreprise utilisatrice ;
- Encouragement par la Commission européenne pour la mise en place de codes de conduite nationaux.
Pour rappel, la Fevad a participé activement à mettre en place une Charte des acteurs du e-commerce, sous l’égide du Secrétaire d’Etat au Numérique en décembre 2018. Cette Charte encadre les relations entre places de marché et entreprises utilisatrices et préfigure ainsi le Code de conduite tel qu’encouragé par le règlement à la faveur des Etats membres. Un travail de mise à jour de cette Charte, notamment au regard du PtoB, a également eu lieu.
Le règlement PtoB est d’effet direct et s’applique en conséquence depuis le 12 juillet 2020. Le règlement nécessite cependant une adaptation du droit français en vue d’en assurer l’effectivité. C’est l’objet d’une partie du projet de loi dit Ddadue, qui prévoit différentes adaptations législatives laissées à la discrétion des Etats membres, notamment, de déterminer les autorités publiques habilitées à constater et sanctionner les manquements au règlement « PtoB » et de déterminer le régime de sanctions applicable aux manquements au règlement.
Le texte du projet de loi portant diverses dispositions d’adaptation au droit de l’UE en matière économique et financière, après avoir été adopté au Sénat en juillet, est en cours d’examen à l’Assemblée, en vue d’un vote début octobre en séance publique.
Le régime juridique de sanctions proposé en cas de manquement aux obligations du règlement relève de celui des sanctions civiles existant pour les pratiques restrictives de concurrence, le non-respect du PtoB étant alors considéré comme une pratique restrictive de concurrence au sens du code de commerce (article 7 du projet de loi Ddadue).
Le dispositif de contrôle et de sanction envisagé est le suivant :
- Décision d’injonction notifiée à la plateforme par la DGCCRF à raison d’un manquement passible d’une amende civile,
- Injonction assortie potentiellement d’une astreinte journalière ne pouvant excéder un montant de 0,1% du chiffre d’affaires mondial hors taxes réalisé au cours du dernier exercice clos par la plateforme. L’astreinte court après expiration du délai imparti à la plateforme pour se mettre en conformité avec la mesure d’injonction notifiée.
- En cas d’inexécution, totale ou partielle, ou d’exécution tardive, la DGCCRF peut procéder à la liquidation de l’astreinte qui ne peut alors excéder 1% du CA mondial HT réalisé au cours du dernier exercice clos par la plateforme.
- Possibilité pour la DGCCRF de publier sur son site ou un autre support de son choix, la décision d’injonction en cas d’inexécution de celle-ci par la plateforme.
La Fevad est disposée à œuvrer à un dialogue constructif avec la DGCCRF, en tout état de cause l’autorité administrative compétente qui sera habilitée, sur l’application de ces dispositions. Nous recommandons que l’application tienne le plus grand compte des lignes directrices de la Commission européenne permettant une interprétation uniforme du texte, notamment sur le classement. Or, ces lignes directrices, qui devaient être publiées en avril 2020, n’ont toujours pas vu le jour. Un document sous forme de questions-réponses a par ailleurs été publié le 10 juillet par la Commission européenne.
Pour plus d’informations sur le projet de loi Ddadue, voir cet article d’une de nos précédentes Newsletters.